Les élu(e)s du Front de gauche n'ont pas l'intention de céder
Les élus(e) communistes et citoyens du Front de gauche, se sont retrouvé(e)s entouré(e)s de leurs collaborateurs pour une journée de travail ouverte aux candidat(e)s de la liste, aux militant(e)s aux femmes et aux hommes qui ont en mars dernier contribué à son succès.
Dans un contexte marqué par l'aggravation de la crise, une politique gouvernementale d'austérité qui ne dit pas son nom, une mobilisation forte pour le droit à la retraite à 60 ans, la question du changement était au centre de ces travaux. Après 25 ans de politique de droite l'objectif est de faire en sorte que ce changement vienne irriguer substantiellement la politique de la CTC. Seuls dans l'hémicycle nous n'y parviendrons pas, nous avons besoin de celles et ceux, qui ont contribué au succès du Front de Gauche. Ensemble nous devons réfléchir à la manière la mieux appropriée de prolonger, dans la mandature, l'engagement commun de notre campagne électorale et de cette façon, mieux résister à la politique du gouvernement Sarkozy Fillon.
Le mouvement social et populaire valide cette approche alors que le pouvoir est affecté par la proximité malsaine qu'il entretient avec le monde de la finance. Ces pratiques nourrissent le populisme d'extrême droite. Paradoxalement, la crise, par son ampleur et ses effets visibles comme en Grèce, suscite la critique du système capitaliste et sa course insensée à la financiarisation. La droite et le MEDEF, la dernière intervention de Sarkozy participe de cette approche, tentent de s'appuyer sur ces contradictions qui taraudent l'opinion pour développer la pédagogie du fatalisme et poursuivre la transformation de la société française. C'est là un enjeu primordial de la bataille des retraites autour de laquelle la confrontation avec le pouvoir s'aiguise depuis les élections régionales. C'est une phase politique nouvelle. Elle relève nos responsabilités au regard des défis posés à l'échelle du pays et en Corse après un quart de siècle de pouvoir ininterrompu de la droite.
Avec sept élu(e)s, six dans l'hémicycle dont le président de l'Assemblée de Corse, une élue à l'Exécutif, il s'agit, non pas de faire appliquer l'ensemble des "20 propositions pour changer la vie en Corse" mais d'obtenir qu'elles soient prises en compte de manière significative. Cela dépendra de notre capacité à promouvoir la question sociale et à susciter les réponses de la CTC les plus conformes avec les aspirations et les attentes populaires. Le renforcement du groupe à l'assemblée de Corse est un atout. Nos liens avec le mouvement social et populaire le sont également pour modifier le rapport de force politique.
Dans l'institution même, la droite reste prisonnière de sa défaite, des divisions consécutives au mécontentement suscité par la composition de sa liste et la sanction qu'elle a subie. Les nationalistes de Femu a Corsica et de Corsica Libera sont sur des lignes différentes mais gardent la même position centriste et font de la surenchère sur leurs thématiques de prédilection pour paralyser la nouvelle majorité et préparer 2014 en caressant l'espoir d'apparaître comme la seule force politique insulaire autour de laquelle un pouvoir régional nouveau et enfin efficace pourrait se constituer.
Dans l'inconfort de la majorité relative, les radicaux de gauche ravivent leur tendance naturelle à rechercher des consensus tout en essayant de nous y enfermer, le débat au Conseil énergétique mardi en donne une illustration. Pour autant ils délaissent l'espace à gauche. Voila pourquoi, sans basculer dans une opposition qui serait interprétée comme une volonté partisane de se distinguer, il faut l'occuper et gagner pied à pied les mesures en faveur du changement.
Les délégations attribuées pour importantes qu'elles sont, n'empêchent pas d'avoir une expression autonome dans le débat public aussi bien sur la politique énergétique que sur l'aménagement du territoire, la culture, les transports, la santé, le logement, les déchets... Sur ces choix de société, la démocratie est le seul moyen, certes plus exigeant en termes d'efforts et de travail, pour faire prévaloir l'intérêt général sans exclure les questions sanitaires et environnementales.
L'initiative conduite par Maria Guidicelli et son cabinet répond à cette nécessité de poser démocratiquement les termes du débat pour un véritable développement durable, économiquement performant, socialement responsable, écologiquement respectueux. C’est également vrai des assisses du foncier et du logement ou encore du PADDUC et de l'application de la loi littoral fortement affirmée, devant les ministres et le Collectif loi littoral, reçu par Dominique Bucchini. La réflexion vaut également pour les autres responsabilités exercées à travers la présidence de l'Assemblée de Corse et la présidence de la 3ème commission dont les travaux sont consacrés aux domaines majeurs de la culture, la santé et le social.
Ni béni oui oui, ni électrons libres nous entendons agir avec principe et esprit de responsabilité en totale autonomie d'expression pour réussir à gauche. L'élection du président du Conseil de surveillance de la CCM et le non respect de l'engagement pris à l'égard de la liste du Front de gauche comme de l'accord politique qui a permis de réunir les quatre listes se réclamant de la gauche, figurent parmi les premiers enseignements à tirer.
Cette union au deuxième tour s'est faite sur une orientation, sinon sur un projet, et une répartition des responsabilités à exercer conformément aux résultats respectifs de chaque liste. La présidence de la CCM devait, dans ce cadre, relever des responsabilités exercées par notre groupe. Il se trouve que nos partenaires à posteriori ont préféré passer un accord avec la droite sans jamais vouloir en débattre dans la majorité. L'élection de Monsieur Mosconi n'a pu être possible qu'au terme d'une lamentable manœuvre politicienne en deux étapes, l’une consistant à demander aux actionnaires minoritaires de ne pas voter, l'autre tenant à s'assurer du soutien de la droite contre une vice présidence.
D'autres éléments, déterminants la politique de la majorité, sont inscrits dans le futur comme la politique des transports, de la santé, du logement du foncier donc du budget dont l'orientation se doit d'être de gauche. Dans le domaine des transports, au-delà du rapport de la mission sénatoriale, ce qui est attendu à présent, impose une réorientation de la politique de la CTC et notamment du dispositif d'aide sociale et plus largement de la logique libérale d'ouverture sans fin à la concurrence qui plombe en définitive la continuité territoriale dans son organisation et son financement au détriment du service public.
La cherté de la vie que la dernière étude de L'INSEE vient de confirmer en révélant un écart de prix de près de 9 % doit être au cœur des enjeux de cette mandature. Les derniers indicateurs sociaux montrent qu'il s'agit d'une urgente nécessité puisque la Corse arrive en tête des régions de France métropolitaines avec le plus fort taux de ménages pauvres, 24,7 %, 1 sur 4, selon ONPES. Nous constatons, avec ces chiffres une aggravation de la situation d'autant plus préoccupante qu'elle se greffe à celle du chômage de longue durée dans le contexte de la crise dont certains commencent à dire qu'elle se fera sentir en Corse par des effets, plus tardifs, compte tenu de l'économie insulaire, mais plus profonds, notamment dans le BTP où le recul de la commande publique est annoncé.
Depuis deux ans, le gouvernement gèle la dotation de continuité territoriale et refuse de renégocier à la hausse sa participation au PEI. C'est ce que nous avons dénoncé en votant contre le compte administratif retraçant l'exécution budgétaire de la dernière année de mandature de la droite. Décidé à mener une politique d'austérité avec le gel des dotations aux collectivités locales, la réduction des effectifs de la fonction publique d'Etat, voila que le gouvernement la recommande aux collectivités locales d'en faire autant sous peine de ponctions supplémentaires sur leurs ressources. C'est cela la réforme des collectivités territoriales et la CTC de par son statut aura à en débattre et à s'y opposer en l'état.
Les services publics sont la cible d'une offensive rude, indépendamment de la RGPP, la Poste a été transformée en société anonyme, la loi HPST pousse à la casse et à la fermeture des hôpitaux publics, la loi NOME contraint EDF à livrer sa production au privé, l'école publique est démantelée...Les réformes en cours privent l'école des moyens financiers et humains indispensables à son bon fonctionnement. Présentées comme techniques, elles soumettent en réalité la formation des élèves aux intérêts privés. Ce refus d'investir dans l’éducation et la formation saborde l’avenir des jeunes générations dans une logique purement financière.
La marchandisation des biens publics est un danger en Corse plus que partout ailleurs. La transformation des services publics, pour nécessaire qu'elle est, ne peut se traduire par une dévalorisation des services publics et des opérateurs historiques notamment dans les transports au bénéfice des low cost. La profondeur de la crise n'a-t-elle pas révélé la pertinence du service public et de la solidarité pour ne pas y sombrer. Or, l'un et l'autre dépendent d'un financement renforcé et pérenne fondé sur la justice fiscale, la contribution des banques et de la BCE. Il faut créer de nouveaux services publics, notamment pour soutenir le développement par une nouvelle forme de crédit et un pôle financier public. La proposition d'un fonds régional pour l'emploi, la formation et les salaires s'inscrit dans cette perspective d'un nouveau modèle de développement combinant l'industriel, l'agriculture et le tourisme en lieu et place du seul tout tourisme.
La Corse a besoin d'une telle ambition politique. Plus elle sera partagée à gauche plus la population y gagnera.
Michel Stefani