Michel Stefani : "La campagne des régionales a commencé"
Le retrait du PADDUC vous a laissé désemparé ?
Non, ni désemparé, ni admiratif
mais plutôt combatif face à une manœuvre antidémocratique que la droite a aggravée ensuite avec le tripatouillage de mode scrutin. C'est d'autant plus dommageable que la dérive affairiste et
mafieuse s'aggrave, la multiplication des assassinats tant à le démontrer, et que cette situation exige au contraire plus de transparence, de démocratie et de citoyenneté.
Dès lors qu'il était battu quel intérêt pour l'Exécutif de vous soumettre son projet ?
L'intérêt de la démocratie. Et à travers le respect des élus celui du peuple qui a été privé du débat contradictoire sur ce projet. Le mépris est souvent un aveu de
faiblesse.
Vous proposez un référendum est ce crédible à 9 mois des échéances ?
Si véritablement l'Exécutif ne craint pas l'avis du peuple, il acceptera de l'organiser conformément à la motion déposée par Dominique Bucchini (1). Dans le cas contraire il
montrera que l'audace démocratique n'est vraiment pas de son côté. A ce moment là les Corses devront se saisir de cet enjeu pour l'obtenir et les communistes y contribueront de toutes leurs
forces.
Qu'est-ce qui vous choque dans le nouveau mode de scrutin ?
Au-delà de la volonté des clans de se "perpétuer" au pouvoir, il y a une remise en cause de l'esprit du Statut particulier et de la loi de janvier 2002 dont la Corse a été
dotée pour favoriser l'expression de toutes les sensibilités au sein de l'Assemblée de Corse. C'était une exigence démocratique, elle ne l'est plus pour des intérêts électoralistes partisans
alors que nous voyons se profiler plus loin des intérêts opaques, puissants et particuliers.
Mais la CTC est
ingérable sans majorité ?
C'est faux, depuis 1992 aucun Exécutif n'a été renversé. En revanche, limiter le rôle des
élus et le contre pouvoir qu'ils peuvent y exercer, ne la rendra pas plus facile à gérer. Il y aura des effets par ailleurs. Même difficile à mettre en œuvre, la motion de défiance a été imaginée
pour éviter justement que l'Assemblée de Corse ne soit un nain face l'Exécutif.
Le PRG revendique la paternité de
cette évolution il est pourtant votre allié ?
En ce faisant l'instrument d'une droite dont on voit chaque jour à quel point la politique va
l'encontre des intérêts populaires, le PRG a montré une conception du rassemblement qui nie la diversité à gauche. Les petits arrangements avec l'Élysée pour des strapontins au gouvernement
l'affaiblissent un peu plus.
Peut-on dire que la Campagne des régionales a commencée ?
C'est évident, mais il serait dangereux et irresponsable de considérer que l'an prochain après la campagne électorale, un résultat favorable à la majorité régionale de droite
aurait valeur de validation de son PADDUC.
Autrement dit vous pensez que la droite remportera les élections
régionales ?
Pas du tout et la mandature montre assez clairement que nous avons été très souvent, pour ne pas dire tout le temps, la seule véritable
opposition de gauche dans cette Assemblée. Nous mènerons cette bataille électorale avec détermination pour rassembler largement et la battre.
Avec quels arguments ?
Un bref regard sur la situation économique et sociale révèle,
cruellement pour les plus vulnérables, où nous en sommes après 25 ans de son pouvoir. Quand quelques centaines de personnes s'enrichissent considérablement dans une région qui compte un peu moins
de 300 000 habitants et que parmi ceux-ci 19 000 foyers, 60 000 personnes, vivent avec mois de 880 € par mois, le sens des responsabilités politiques commande de prendre en considération leurs
difficultés prioritairement.
En quelques mots que proposez-vous ?
La
priorité n'est pas à la "désanctuarisation" et au contournement de la loi littoral afin de permettre une urbanisation de "classe" sur les 200 KM de linéaires côtiers où cela est encore possible.
La priorité est à la lutte contre la précarité, contre la vie chère, contre le détournement des dispositifs de réfaction de TVA et de continuité territoriale au bénéfice d'intérêts particuliers
et privés.
Vous les avez dénoncez à plusieurs reprises
Oui parce que
s'agissant, par exemple, de la continuité territoriale il faudra l'an prochain combler un trou de 20 M€ auquel s'ajoute celui du budget à 50 M€. Voila pourquoi, nous proposons que l'Etat relève
sa participation au PEI à 90 %, qu'il s'engage à financer le raccordement de la Corse au GALSI et qu'il participe à la réalisation des 9 000 logements sociaux manquants.
Que pensez-vous du Congrès de Versailles ?
Le miel des mots
et l'acide des réformes libérales. Nicolas Sarkozy et l'UMP entendent poursuivre leur politique désastreuse avec la retraite à 67 ans, la diminution de la protection sociale, les milliards pour
les grands patrons et les riches et un retour en arrière sur la décentralisation avec un double effet étrangleur les collectivités locales et amplificateur des charges sur les
ménages.
Propos recueillis par Noël GRAZIANI pour Terre Corse
(1) Motion déposée avec demande d'examen prioritaire par Dominique BUCCHINI président du groupe communiste républicain citoyen à l'Assemblée de Corse afin que soit organisé un référendum sur le projet de PADDUC de la majorité régionale de droite.
Considérant que : l'Assemblée de Corse a été privée d'un véritable débat de fond, contradictoire sur tous les aspects du PADDUC ;
Considérant que : l'Exécutif dit vouloir aller au débat à travers la campagne des élections régionales de 2010 ;
Considérant que : ce choix ne serait valablement être considéré comme une procédure de ratification ;
Considérant que : la modification du mode de scrutin, destinée à exclure de l'Assemblée de Corse tout contre pouvoir, renforce le caractère antidémocratique de cette manœuvre ;
Considérant que : le peuple aspire à ce débat en étant partie prenante de l'élaboration de ce projet de société qui engage son avenir ;
L'Assemblée de Corse demande : que la CTC organise un référendum sur le projet de PADDUC de l'Exécutif indépendamment des prochaines élections régionales et avant celles-ci de manière à laisser un délai de quatre mois entre les deux scrutins.
Les groupes Communiste républicain et citoyen, PNC Chjama, Corsica Libéra ont voté pour, L'UMP et le PRG ont voté contre, les autres se sont abstenus. La motion a été rejetée.