Européennes : Michel Stefani candidat sur la liste du PCF conduite par Ian Brossat

Le 26 mai aura lieu le scrutin de renouvellement du Parlement européen. Dans le contexte social, économique et politique, il sera de première importance face à la montée de l’extrême droite, des nationalismes et du populisme dans une Europe ultralibérale dominée par le système financier capitaliste.
Dans son interview Michel Stefani répond à nos questions et situe les enjeux au regard des problématiques de la Corse, de l’impact des politiques impulsées par la Commission européenne de manière très centralisée et antidémocratique avec la complicité des gouvernements de chaque Etat membre.
Terre Corse : Michel Stefani vous êtes candidat sur la liste du PCF conduite par Ian Brossat comment voyez-vous cette campagne sachant que l’électorat se détourne de cette élection à chaque scrutin ?
Michel Stefani : C’est une campagne qui demande d’autant plus d’énergie que l’opacité est la règle institutionnelle qui accompagne la volonté politique de tenir les citoyens éloignés des décisions et de la perception des responsabilités. Les ministres vont à Strasbourg arrêtent les modalités de la politique antisociale qui sera transcrite en droit national. Ensuite ils expliquent que l’Europe impose les choses. C’est du cynisme. Par exemple ils sont d’accords à Paris comme à Bruxelles pour la règle d’or et les critères de Maastricht. Les Etats membres ont l’obligation de réduire la dépense publique, donc sociale, pour rester sous la barre des 3 % de déficit. Ce faisant la souveraineté nationale est abandonnée à une Commission non élue qui fait à peu prés ce qu’elle veut.
Ici les dirigeants nationalistes considèrent qu’il vaut mieux avoir à faire avec Bruxelles qu’avec Paris vous en pensez quoi ?
Le combat anticapitaliste contre le libéralisme n’est pas une affaire de préférence entre deux niveaux de pouvoir qui ont en commun l’objectif de servir les intérêts du capital et du système financier spéculatif. Ce qui nous intéresse dés lors, dans un pays comme la France où les conquêtes sociales et démocratiques arrachées à la Libération font encore la différence avec les pays voisins, c’est de défendre les services publics contre la déréglementation et la privatisation, c’est de défendre la protection sociale, les retraites par répartition, la sécurité sociale qui sont attaquées au prétexte qu’elles seraient des fardeaux pour la société. Il faut avoir en mémoire la fameuse phrase de Macron : « ça coute un pognon de dingue » pour comprendre le raisonnement et faire le rapprochement avec ceux du MEDEF et les 47 milliards de dividendes versés aux actionnaires des sociétés du CAC 40.
Vous voulez combattre l’Europe libérale à partir du local est-ce bien crédible ?
En tout cas quand on voit ce qui se passe en ce moment même avec la déréglementation européenne, cette concurrence libre et non faussée à l’œuvre depuis 20 ans. Sur la desserte de la Corse elle a failli balayer Air Corsica bien avant la SNCM, certains l’oublient. Sur le fond les compagnies low cost ont été privilégiées et subventionnées par des moyens détournés. Corsica Ferries, Ryannair, EasyJet… les tarifs devaient baisser, le service s’améliorer mais les faits montrent le contraire et des centaines d’emplois à statuts ont été sacrifiés en Corse comme sur le continent et ça continue avec la CMN. Pareil pour l’énergie, les opérateurs historiques sont mis en concurrence avec des prestataires low cost. ENGIE veut se retirer de la Corse 80 emplois sont menacés et bientôt les barrages, promis à la privatisation, seront exploités par ces mêmes prestataires avec des saignées dans l’emploi parce que c’est toujours la variable d’ajustement.
L’Europe des gens pas l’Europe de l’argent c’est le mot d’ordre de votre liste…
Il résume bien ce que nous voulons. Une Europe pour les peuples mettant au cœur de ses politiques la justice sociale et le progrès social, la juste répartition de la richesse et la lutte contre l’évasion et la fraude fiscale amenées à des niveaux records avec Junker et consorts. Cet argent nous voulons le mettre au service de la transition écologique, de l’exception agricole, d’une agriculture dégagée de la domination des firmes agroalimentaires et des logiques de libre échange aux conséquences désastreuses pour les agriculteurs, les consommateurs, les normes environnementales et sanitaires. Cette politique c’est aussi celle de la solidarité et de la coopération entre Etats européens et au-delà dans le bassin méditerranéen pour mettre fin à cette ignominie à l’égard des peuples et de ceux qui, migrants par la force des choses, fuient la guerre, la pauvreté, le malheur quotidien et trop souvent périssent en Méditerranée où alors sont accueillis de manière indigne.
La Corse peut elle être plus entendue avec une représentation à Bruxelles comme le réclament les nationalistes ?
C’est l’arlésienne, la question c’est la solidarité dont la Corse a besoin, non pas pour l’infime minorité de contributeurs à l’ISF qui s’en moque, mais pour l’immense majorité et en particuliers les 60 000 personnes qui vivent avec moins de 1000 euros. Ceux là ont besoin de services publics, de l’accès aux soins, aux transports, à la culture. Par conséquent il est préférable, en premier lieu, de se battre pour le maintien de tout cela et de la solidarité nationale indispensable en ce sens. Quand la Corse perçoit 1 euro de l’Europe, c’est qu’elle en a perçu 4 avec les dotations de l’Etat. Faire un trait la dessus au nom d’un fédéralisme européen plus adéquat aux visées d’une autonomie de plein droit, voire de l’indépendance, mettrait la Corse encore plus à la périphérie d’une Europe taillée pour la concurrence débridée entre grandes régions aux moyens incomparables à ceux de la Corse.
Quels sont les atouts de votre liste
Elle reflète l’espoir et repose sur l’engagement du Parti communiste français, le seul à avoir voté contre le Traité de Maastricht, à avoir combattu les Traités suivants dont le Traité constitutionnel de 2005. Pour autant elle compte des non communistes et a le soutien du mouvement République et Socialisme. Elle est composée de femmes et d’hommes qui ont l’intérêt général comme seule boussole. D’une grande diversité, elle associe des engagements militants, associatifs, syndicaux et politiques, des élus de terrain, des employés, des ouvriers, des étudiants… Ensemble, ils constituent une expérience originale et une force de gauche au service des travailleurs, des intérêts populaires, de l’action pour la transformation sociale de l’Europe. Enfin n’oublions que ce scrutin est le premier au plan national depuis l’élection présidentielle et de ce fait il permet de sanctionner la politique du gouvernement Philippe. C’est ce que nous proposons avec notre liste.
Propos recueillis par Noel GRAZIANI