L’avenir énergétique de la Corse est en jeu

Les agents EDF et leur syndicat CGT ont organisé une rencontre débat le 23 février. Les dirigeants syndicaux ont insisté sur la nécessité de réaliser les investissements inscrits initialement à la programmation pluriannuelle de l’énergie.
L’échange a confirmé l’intérêt accordé à cette « question vitale » du devenir énergétique de la Corse dans un futur proche si effectivement la puissance de la nouvelle Centrale du grand Ajaccio était revue à la baisse pour moitié et les investissements concernant l’acheminement du gaz naturel réduits à une « plateforme sous-marine ».
L’accès pour les usagers à la fourniture électrique en 2023 est en effet étroitement dépendant du respect du calendrier des investissements inscrits à la programmation pluriannuelle de l’énergie. La nouvelle Centrale du Vazzio devrait à cette date être opérationnelle et pour cela avoir été mise en chantier en 2018. Nous sommes en 2019.
Indépendamment des investissements déjà réalisés dans les moyens de production et de transport en électricité de l’île, le remplacement de l’actuelle centrale du Vazzio est indispensable afin de sécuriser le système électrique de la Corse. Torpillé par Nicolas Hulot en aout 2018, est venu ensuite l’assaut de la CRE (Commission de Régulation de l’Energie) et de la directrice de l’énergie, au ministère de la transition écologique et solidaire Madame Virginie Schwarz.
Le ministère, conteste le dimensionnement « initialement prévu » de la future centrale du Vazzio comme le projet de gazoduc terrestre au nom de la contrainte financière :
- Pour l’alimentation en gaz des centrales thermiques il a été envisagé de construire une barge au large de Lucciana puis une seconde prés d'Ajaccio et maintenant une plateforme sous-marine alors que le projet de gazoduc serait abandonné.
- Pour la centrale sur Ajaccio elle serait de 125 mégawatt au lieu de 250 et mettrait en péril l’équilibre offre/demande.
Sur ces points, le non respect des engagements de l’Etat par le gouvernement engendrerait des retards considérables entraînant un recours aux turbines à combustion (TAC) en contradiction avec les objectifs de transition écologique.
L’austérité n’a pas de mémoire et cette politique à courte vue ramènera la Corse au black out de 2005 (fait unique en France métropolitaine à l’échelle d’une région) avec des coupures d’électricité durant 27 jours. Personne, ne comprendrait après 3 PPE que l’on puisse en revenir là. Il faut donc que les engagements de l’Etat soient respectés tels qu’ils ont été énoncés depuis et établis précisément pour empêcher que ne se répète pareille crise énergétique.
Sauf à fouler aux pieds le protocole signé en décembre 2016 par Ségolène Royal ministre de l’écologie et Gilles Simeoni président de l’Exécutif de Corse, la mise en service de la future centrale ajaccienne au gaz naturel, doit intervenir en 2023 avec une puissance de 250 mégawatt.
Se pose de la même façon la question de l’exploitation des réseaux de « gaz de ville » de Corse et du maintien d’Engie opérateur historique exploitant, sans concession depuis 30 ans, des réseaux de gaz d’Ajaccio et Bastia. Les emplois à statut de 85 agents et de nombreux emplois induits en dépendent. Et chacun sait que le chômage en Corse est au plus haut et les emplois industriels assez rares.
Toutefois, Virginie Schwarz a indiqué qu’Engie quitterait la Corse et entériné la disparition du GPL du paysage énergétique insulaire à l’horizon 2030. Cette incroyable légèreté du gouvernement prépare l’arrivée d’opérateurs privés pour lesquels la péréquation tarifaire et l’emploi ne seront pas la première préoccupation. L’exigence du maintien d’Engie n’est donc pas une fantaisie pour les emplois locaux comme pour les usagers sachant que l’exploitation des réseaux est déficitaire de 10 M€ chaque année. La précarité énergétique déjà très forte en Corse s’aggraverait comme les risques liés à l’exploitation du gaz au niveau de la maintenance et de l’investissement sur les réseaux.
L’heure n’est donc pas à la renégociation avec le gouvernement comme cela a été dit après la rencontre entre Gille Siméoni et le Ministre François de Rugy mais au strict respect de la contractualisation, formalisée par décret, de la programmation pluriannuelle de l’énergie s’agissant d’une part de la réalisation de la centrale d’Ajaccio à cycle combiné, du gazoduc et de la barge d’approvisionnement des centrales de Lucciana et d’Ajaccio implantée cote orientale et d’autre part du maintien de l’opérateur historique Engie pour l’exploitation des réseaux de gaz de Bastia et Ajaccio.
L’avenir énergétique de la Corse est en jeu. La Corse et les Corses, ont besoin d’un service public de qualité, tant, dans le domaine de l’énergie électrique, que dans le domaine du gaz.
Michel Stefani