Gilets jaunes et Gilets rouges se rassemblent pour la Justice fiscale et sociale

Plusieurs centaines de personnes à l’appel de la CGT et du collectif de Gilets jaunes ont manifesté ce mardi à Bastia comme partout en France pour l’augmentation des salaires et contre la cherté de la vie, pour réformer la fiscalité et mettre fin au détournement des réfactions de TVA préjudiciable aux consommateurs, pour développer les services publics et créer des emplois.
Répondre « sur le bitume » au grand débat national organisé par Emmanuel Macron, c’était l’objectif de la CGT. Tous les salariés du public et du privé, fonctionnaires, retraités étaient appelés à descendre dans la rue ou quitter leur entreprise partout en France. Dans plusieurs régions, départements et villes Solidaires, FO et la FSU, se sont associées pour réagir « à l’urgence sociale ».
A Bastia la CGT et la FSU étaient ensemble avec les Gilets jaunes comme annoncé lors de la conférence de presse commune tenue jeudi dernier à Bastia à la bourse du travail Emile Réboli. « Dans plus de 30 départements, il y aura des mobilisations communes », a précisé hier sur RTL le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, « sur des mots d’ordre très précis ». Parmi eux, le respect du droit à manifester remis en cause par la loi anticasseurs. Associations et syndicats dénoncent les « menaces sur les libertés d’opinion et d’expression des oppositions » qu’elle comporte. Hasard du calendrier cette loi qui s’attaque aux citoyens a été adoptée en première lecture le même jour par un vote écrasant à l’Assemblée nationale de la droite et de la LREM. Les préfets, soumis au gouvernement, pourront donc interdire de manifestation quiconque constitue à leurs yeux « une menace à l’ordre public » en lieu et place de la justice.
Voila la modernité jupitérienne quand l’urgence sociale appelle des réponses autres que répressives. Obtenir une augmentation du Smic à 1 800 euros comme des salaires et des pensions, revaloriser le point d’indice pour tous les fonctionnaires, réformer la fiscalité par un impôt sur le revenu plus progressif et rétablir l’ISF, contrôler et conditionner les aides publiques aux grandes entreprises, développer les services publics sur tous les territoires : autant de revendications pour mieux répartir les richesses reprises régulièrement dans les manifestations sociales, mais aussi désormais dans les ronds-points des gilets jaunes qui ont essaimé depuis novembre dernier.
La particularité en Corse tient au fait que la solidarité nationale y est détournée par une minorité qui s’enrichit honteusement en captant les dispositifs fiscaux de soutien à la consommation des ménages. C’est vrai pour les carburants comme pour le panier de la ménagère au total il s’agit de 194 millions d’euros de réfaction de TVA auxquels s’ajoutent le franco port sur les marchandises rentrant en Corse et soulagées pour partie du cout de transport grâce à la continuité territoriale.
Tout cela n’a rien de récent mais permet de mesurer, avec le recul de 30 ans, le décalage produit par la réponse institutionnelle et fiscale (celle-ci à l’avantage exclusif du patronat) par rapport à la question sociale. En 1989 la Corse a connu le plus grand mouvement social de son histoire pour cette raison et les mécanismes ont été décortiqués pour mettre en lumière ces détournements de solidarité nationale. Le dernier rapport de l’Inspection générale des finances note dans son annexe 3 page 20 : « L’étroitesse du marché intérieur corse est favorable à la constitution d’oligopoles captant une part des avantages fiscaux accordés à la Corse et générant une concurrence déloyale ».
S’en suit une analyse suffisamment précise pour pouvoir agir et rétablir la justice sociale et fiscale en mettant en cause la main mise sur l’économie insulaire et le pouvoir d’achat des ménages à travers le consortium des patrons corses et la distribution des carburants. Cette action incombe à l’Etat garant du bon usage de l’argent public dans le cadre des principes de la solidarité nationale. C’est ce que nous avons demandé aujourd’hui devant la préfecture de Haute Corse et rappelé au patronat devant la Chambre de commerce et d’industrie.
Michel Stefani