Pour une large mobilisation sociale et populaire
La rentrée politique s’annonce difficile après une saison estivale qui n'a pas été de ce point de vue un grand millésime. En juillet c’est la compagnie régionale maritime qui a été sabordée en plein hémicycle de la collectivité unique par ceux là mêmes qui étaient restés sourds à nos arguments pointant les risques d’une volonté idéologique aux contours juridiques et financiers aléatoires.
Le Parquet national financier c’était même intéressé aux conditions et au montant de l’offre, sous évaluée, faite par l’Exécutif pour le rachat des deux navires nécessitant de lourds travaux de conformité aux normes environnementales MARPOL. A dix millions d’euros le consortium des patrons corses, propriétaire de Corsica Linéa, aurait été remboursé de son apport initial à la reprise de la SNCM mais la Collectivité aurait été perdante.
La majorité régionale affirme avoir régler la question du transport maritime et continue de cibler « les marins CGT » et « les intérêts marseillais » en soulignant que le temps des grèves est révolu mais la prétendue réussite est non seulement fondée sur un plan social lourd d’impact pour l’emploi mais aussi sur une succession de décisions incertaines. En trois ans ce ne sont pas moins de trois délégations de service public (DSP) baptisées de raccordements ou transitoires et de deux tests marché. La procédure serait validée par Bruxelles est-il dit, cela devrait la mettre à l’abri des revirements de la dite Commission plus tatillonne quand il s’agissait de la réglementation applicable à l’entreprise publique.
Aujourd’hui, l’objectif de tous ces libéraux patentés est par là même atteint. Les low cost ont le monopole du transport de passagers et les acteurs privés délégataires en sont à demander une augmentation des obligations de service public pour obtenir une compensation financière publique plus importante. Le renversement de situation est saisissant. En effet, quand nous demandions un million huit cent mille mètres linéaires de capacité de fret sur la DSP de toutes parts on nous rétorquait que c’était trop. A présent on nous donne raison et ceux qui n’hésitaient pas à emprunter la Corsica Ferries à Toulon plutôt que la CMN et la SNCM à Marseille sont devenus les principaux demandeurs.
Autre épisode intéressant celui des ordures ménagères au moment ou la centre d’enfouissement de Prunelli di Fiumorbu est bloqué par les élus qui réclament en contre partie du déblocage une salle des fêtes, il est question là aussi de transition et surtout de recherche par l’Exécutif d’un consensus général. Par le passé les mêmes étaient plus réfractaires à ce type d’approche à ce propos. Désormais ils plaident donc pour un transfert sur le continent voire à l’étranger des ordures ménagères insulaires. Problèmes épineux s’il en est, les surcouts seraient importants pour la collectivité et les administrés indépendamment du principe plus que contestable de faire supporter ailleurs les nuisances découlant d’une incurie locale manifeste. Reste à voir si avec la démission de Nicolas Hulot la promesse d’une dotation supplémentaire de cinq millions d’euros sera maintenue.
Avec les paillotes on peut constater que la fameuse motion de la majorité régionale a porté ses fruits. Comme nous l’avions indiqué le risque de contagion au-delà des plages urbaines était réel. La demande de dérogation au cadre légal d’occupation du domaine public maritime pour permettre le maintien des installations quasiment à l’année a été un signe négatif laissant penser aux exploitants de ces structures que tout était possible partout au nom de l’intérêt économique micro local sinon particulier loin de l’esprit, voire du respect indispensable de la loi littoral.
Que n’a-t-on pu entendre durant des mois et des nuits d’élaboration du PADDUC sur le projet de société. Il se voulait totalement différent de cette réalité, en 2018, trois ans après l’élection de la première majorité nationaliste. Celle-ci dispose avec la collectivité unique des principaux leviers du pouvoir régional et gère un budget d’un milliard deux cent cinquante millions d’euros. Comme on l’a vu le recours à l’emprunt est son point fort quant à l’investissement s’il on s’en tient au dernier budget les objectifs de cet exercice ne pourront être atteints avant clôture.
Les intercommunalités sont d’ailleurs appelées à monter des projets dans l’urgence pour éviter « les dégagements d’office » notamment sur des fonds européens. L’année électorale et l’apprentissage de la collectivité unique sont évoqués mais cela ne peut suffire à faire oublier des annonces exagérément optimistes.
La Corse est très inégalitaire et en cette fin de saison estivale les interrogations sont nombreuses sur le modèle économique de la mono activité touristique car s’il permet l’enrichissement de quelques-uns il est facteur d’appauvrissement de beaucoup d’autres à travers l’emploi précaire et la cherté de la vie. Il faut donc penser le développement économique en corrigeant cette hypertrophie au bénéfice des secteurs industriel et agricole comme des services publics sans cesse attaqués au nom de la libre concurrence et de l’austérité.
« Nous ne sommes pas dans ce que nous avions imaginé. Nous ne nous sommes pas battus pour les conneries que l'on est en train de faire. Socialement, culturellement et économiquement, le compte n'y est pas ». Les propos sont de Louis Sarrocchi présent dans la cave d’Aléria en aout 1975.
C’est d’autant plus inquiétant que le récent cadrage budgétaire du premier ministre pour 2019 est sous l’angle exclusif de l’austérité et de l’affaiblissement constant de la solidarité nationale qui impactera aussi bien les dotations des collectivités locales que les prestations sociales des ménages des chômeurs et encore les retraites. La rentrée sera en Corse comme dans tout le pays sociale et dans la campagne qui commence pour l’élection européenne de mai 2019 il faudra peser les enjeux du vote au regard de cette urgence sociale produit de cette politique libérale toujours plus débridée à l’avantage des plus riches et des marchés financiers. Aux forces sociales et populaires d’imposer l’humain d’abord. C’est le sens de l’appel lancé par le Parti communiste français à la plus large mobilisation.
Michel STEFANI