Desserte maritime : « l’enlisement »

Sur les enjeux les plus significatifs de ce qu’elle annonçait, la majorité régionale est à la peine c’est le moins qu’on puisse dire.
On ne parlera pas des déchets et du plan d'action pour permettre aux collectivités d'agir vite…depuis 2016. Destiné à enclencher une mutation rapide des modes collectifs de gestion des déchets et des comportements, il visait une réduction de la production.
Les résultats attendus étaient relativement ambitieux sinon hors de portée dans les délais indiqués pour atteindre les 60% de valorisation en 3 ans pour les collectivités rurales et 5 ans pour les collectivités urbaines. La réalité s’impose avec ses difficultés et la critique qui se voulait intransigeante dans l’opposition se veut aujourd’hui très mesurée dans le propos.
L’art est difficile.
Cela se vérifie tout autant à travers les atermoiements qui accompagnent la création de la compagnie maritime régionale. On se souvient de cette fin janvier 2016 et du soutien affiché par l’Exécutif de la CTC au consortium des patrons corses et à son OPA sulfureuse sur l’ex SNCM au mépris de la décision du Tribunal de commerce de Marseille.
Une fois l’opération réussie, les nouveaux dirigeants de la compagnie rebaptisée Corsica Linéa, ont accepté dans le principe de vendre deux navires à la CTC qui voulait en disposer pour créer une SEM d’investissement. Le Parquet national financier s’interrogera dés lors au point d’ouvrir une enquête préliminaire fin 2017. Le montant de la transaction établi à 10 M€ serait notoirement sous-évalué pour une valeur à dire d’expert proche des 35 M€.
Et si depuis des perquisitions ont été réalisées aussi bien au siège de l’OTC que d’entreprises du consortium plus rien n’a filtré du côté de la justice à ce propos. Il faudra donc attendre pour en savoir plus mais cet épisode minoré coté Exécutif vient complexifier un peu plus un projet avec lequel deux autres SEMOP doivent voir le jour.
Du coup,
le cabinet d’experts, missionné pour l’assistance à maitrise d’ouvrage, déconseille d’engager la CDC dans une opération qui devrait devenir particulièrement couteuse pour rendre les navires en question, de plus de 25 ans, compatibles avec les normes antipollution MARPOL de 2020.
Voila donc comment nous sommes passés par une DSP transitoire et un premier « test marché » précédent une seconde DSP dite de raccordement et désormais une troisième DSP de réflexion accompagnée d’un nouveau « test marché ».
Pour mémoire il était dit qu’au sortir de décennies d’incertitudes juridiques, pour ne pas dire d’acharnement juridique des actionnaires de la compagnie low cost Corsica Ferries, tout cela devait aboutir, après diverses consultations des instances européennes, en deux ans. A ce stade l’impression qui se dégage est plutôt celle d’un enlisement.
Le calendrier revisité doit conduire la CDC, autorité délégante à attribuer les délégations en 2021 à la fin de la mandature. Au préalable, elle devrait avoir créé les deux SEMOP la première dans laquelle l’actionnariat privé serait majoritaire pour desservir les ports de Bastia et Ajaccio la seconde avec l’actionnariat public majoritaire sur la desserte des ports de Porto Vecchio, Propriano, et Ile Rousse.
Une fois de plus, il est affirmé que la fiabilité juridique sera au rendez-vous. La concertation très poussée avec l’Etat, la Commission et les DG transport et concurrence de l’Union européenne, le montrerait. Au regard du projet global et de l’expérience depuis 2001, il est permis d’en douter d’une part en raison du projet lui-même ensuite parce que les opérateurs ne semblent pas au bout de leurs ambitions.
Avec les dirigeants de Corsica Ferries on en n’a vu d’autres mais ceux du consortium ne sont pas de reste. L’offre de rachat de la CMN, ne semble pas qu’amicale, en pleine bataille pour la reconquête des parts de marché sur le fret. Les alliances objectives d’hier pour détruire la SNCM ne sont plus qu’un lointain souvenir.
Michel STEFANI
CDC Collectivité de Corse
OTC Office des transports de la Corse
SEMOP Société d’économie mixte à objet particulier
SEM Société d’économie mixte