Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Michel Stefani

Corsica Ferries : « Il serait inadmissible que les actionnaires perçoivent une quelconque indemnité ».

22 Février 2018

manifestation devant le siège de CFF en février 2017 pour dénoncer la décision du TA de Bastia et la procédure fallacieuse des actionnaires de la société installée en Suisse

Avec la décision du Tribunal administratif (TA) Bastia de février 2017, nous avons l’exemple type de ce qu’est sur le long terme l’entreprise de démolition du service public « à la française » pour faire place aux opérateurs low cost. La connivence libérale se vérifie ainsi à tous les niveaux Etat, Région, Union européenne (UE) et à travers des décisions de justice conformes à cet objectif de manière évolutive et contradictoire dans le temps.

Le dispositif d’aide sociale, réputé illégal par la Chambre régionale des comptes (CRC), mis en place en 2001 ne visait qu’à offrir à la Corsica Ferries France (CFF) les moyens financiers de déployer une concurrence déloyale et agressive contre la délégation de service public (DSP) et les opérateurs historiques attributaires de celle-ci le groupement CMN SNCM.

C’était une situation ubuesque, unique en France, où l’autorité délégante la Collectivité territoriale de Corse (CTC), pleinement en charge de la compétence transport, disposant de la dotation de continuité territoriale pour ce faire, a effectivement organisé le service public en subventionnant parallèlement les opérateurs concurrents à ses délégataires sur la même desserte.

La séparation entre le service de base et le service complémentaire, comme nous l’avions indiqué, était destinée à fragiliser le montage juridique de l’appel d’offres (AO) et à encourager l’acharnement procédurier des actionnaires de CFF devant les tribunaux quand par ailleurs la Commission européenne (CE) modifiait unilatéralement la réglementation pour in fine libéraliser de plus en plus en opérant la légalisation à postériori des pratiques de dumping social, fiscal et commercial.

La justification de cette politique est soit disant la baisse des tarifs à l’avantage non plus de l’usager mais du client. L’expérience montre qu’il s’agit surtout de balivernes dés lors qu’il est question de progrès social, de régularité, de ponctualité, de sécurité, de respect des normes environnementales. En deux mots d’intérêt général.

La baisse des coûts fixes dans tous les domaines avec des prestations de moindre qualité devient la priorité pour dégager un maximum de profits et de dividendes. Mr Mattei est annoncé cette année 365ème dans le palmarès des 500 premières fortunes de France par le magazine Challenge.

Si les usagers sont perdants les travailleurs le sont aussi. 1500 emplois à statut sous pavillon français premier registre ont été supprimés sur la desserte de la Corse en 15 ans. Dans le même temps à chaque mauvais coup il s’est trouvé dans ce petit monde des affaires un heureux gagnant on se souvient de Buttler et des 50 M€ empochés grâce à la privatisation en 2005 de la SNCM sous le pilotage Villepin Sarkozy.

Les actionnaires de CFF auraient pu eux aussi toucher le jackpot sur la foi d’une auto-expertise évaluant le préjudice pour la compagnie à 84 M€ alors qu’en réalité elle a perçu plus de 180 M€ en subvention d’aide sociale prélevés sur l’enveloppe de continuité territoriale et de surcroit sans aucun contrôle des titres de transport émis comme cela devait l’être.

Heureusement la Cours administrative d’appel (CAA) de Marseille n’a pas tenu compte de cette auto-expertise et contrairement au TA de Bastia a demandé "une contre expertise économique et comptable pour pouvoir statuer par un nouvel arrêt et établir le montant de l’indemnité que la CTC devra verser aux actionnaires de CFF".

Mais le scandale ne s’arrête pas là. La Commission européenne aux dires de l’Office des transports de la Corse (OTC) avait en 2007 validé le service complémentaire établi pour absorber les pics de trafic saisonnier notamment au départ de Marseille. La Commission européenne a attendu mai 2013 pour estimer que "les compensations perçues par la SNCM constituaient des aides illégales et incompatibles avec le marché intérieur". Et effectivement les services ont été effectués conformément au cahier des charges de l’AO voté par l’Assemblée de Corse.

Enfin on ne peut faire abstraction du fait que la CAA de Marseille, en avril 2016, avait annulé la DSP 2007/2013 au seul motif que : "l’ensemble des compensations financières prévues par celle-ci présentaient le caractère d’une aide d’Etat irrégulière faute d’avoir été notifiées à la Commission européenne".

Voila pourquoi, il serait inadmissible que les actionnaires de CFF perçoivent une quelconque indemnité.

Le président de la République a demandé à Bercy un diagnostic de l’économie de la Corse il serait intéressant que ces investigations touchent à cette problématique des transports et du bon usage de l’enveloppe de continuité territoriale.

Michel Stefani

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article