Une ambition de fraternité, d’égalité sociale, antiraciste, universaliste, démocratique et écologique.
Les primaires de la droite cachent l’unité profonde de ses candidats autour d’un même programme économique et social.
Tous annoncent la couleur s’agissant de la réduction de la dépense publique. Pas question de toucher au bouclier fiscal des Bettencourt et consorts, ni même au CICE qui gave les patrons du CAC 40. Non ! Ce qu’il faut c’est réduire l’emploi public et les services indispensables à la population : santé, transports, énergie, logement, éducation, culture… Le montant de la ponction à opérer varie, selon les concurrents de cette mascarade préélectorale, entre 80 et 100 milliards d’euros. Viennent ensuite la fin des trente-cinq heures, le recul de l’âge de départ en retraite, le sabotage de la sécurité sociale, les offensives antisyndicales, la chasse aux chômeurs et aux pauvres, qualifiés « d’assistés ». Ce ne sont ici que quelques exemples des coups de marteau pilon que veulent assener les primo-candidats de cette droite plus droitière.
Tous veulent augmenter le transfert de richesses du travail vers le capital dont le coût pour la société est superbement ignoré. Ils ne se séparent que dans le verbe ou la durée de l’offensive pour briser les derniers fondements du pacte social républicain établi à la Libération avec le programme du Conseil National de la Résistance. L’explosion de la précarité les chômeurs par millions doivent de surcroit se préparer à souffrir avec compréhension et docilité dans « l’intérêt de la France » ce qui, dans leur bouche, signifie l’intérêt des puissants et de la finance. Pas de quoi susciter l’enthousiasme aussi bien pour l’électeur de droite que pour celui de gauche profondément déçu par le PS et François Hollande.
Cet horizon politique réputé indépassable par ceux la mêmes qui le tracent dans les institutions internationales et européennes, pousse certains à se différencier sur le terrain de l’identité avec un discours falsificateur tendant à séduire un électorat écœuré et abreuvé des thèses d’extrême-droite. La sortie de Nicolas Sarkozy - «dès que l’on devient Français, nos ancêtres sont Gaulois» - reprise en boucle par des médias relayeurs de cette conception dangereuse du débat publique déconnecté de la question sociale, en est la plus significative. S’il s’agit évidemment d’une grossière provocation, visant à exclure de la République les citoyens d’origines africaines ou nord-africaines, c’est surtout dans le prolongement de l’hystérie identitaire, véhiculée tout l’été après l’attentat de Nice et celui de Saint Etienne du Rouvray, une opération politique d’envergure.
Son objectif est de fédérer un grand nombre d’électeurs sur les bases idéologiques de la vieille tradition maurassienne d’extrême-droite. C’est là un signe extrêmement inquiétant de l’évolution du débat politique. Face aux impasses libérales qui creusent la séparation entre les citoyens et ceux qui prétendent les représenter, cette fiction nationale, monocolore, chrétienne et nationaliste, stigmatise essentiellement nos concitoyens de confession musulmane. Polémique et populiste, elle crée des divisions et des oppositions mortifères. Elle nourrit le repli sur soi dans une pensée régressive bouchant toute perspective de progrès humains et sociétaux, de respect de la planète pris dans sa dimension écologique la plus poussée.
Ce discours démagogique travaille en profondeur les sociétés pour, tout en flattant les peuples sonnés par la violence du capital mondialisé et financiarisé, les détourner de la nécessaire action populaire et anticapitaliste. Son objectif fondamental est d’asseoir une base idéologique et des conditions durables à l’acceptation de la situation présente. L’action politique est discréditée par cette propagande qui véhicule la fausse idée de l’impuissance du pouvoir politique alors qu’il sert précisément une caste cupide au détriment des peuples. Si des reculs notables ressortent aujourd’hui en ce sens sous couvert de menées obscurantistes, encouragées par les services spéciaux occidentaux, inversement ils soulignent l’urgence de refonder la démocratie sur des critères politiques économiques environnementaux et sociaux de progrès.
Dans notre pays à la veille des échéances décisives de 2017, seule une dynamique populaire, unitaire, peut offrir une perspective nouvelle d’émancipation et régénérer les tissus d’une démocratie aussi agonisante que la 5ème République l’est en raison des politiques mises en œuvre par ceux-là mêmes qui prétendent défendre et promouvoir l’une et l’autre quand dans les faits ils servent les intérêts capitalistes.
C’est pourquoi nous ne pouvons faire abstraction des propos du président de l’Assemblée de Corse consécutifs à la publication de son livre Avanzà. Jean Guy Talamoni dit : « le modèle créé par Paoli est une laïcité « tranquille » qui ne consiste pas à éjecter le fait religieux, a fortiori l'Église. Contrairement à la laïcité à la française, qualifiée de « virulente » par des chercheurs américains ». Cette approche pourrait laisser croire que la loi de 1905 s’oppose à la liberté de culte alors qu’elle est la garantie pour chacun, quelle que soit sa religion, de la pratiquée librement sans toutefois l’imposer aux autres et particulièrement pourrait-on dire aux non-croyants. Dés lors, tout un chacun est en mesure d’apprécier la différence entre les devises nationales des Etats Unis : « In god we trust » (En dieu nous croyons), de l’Angleterre : « God and my right » (Dieu et mon droit) et celle de la France : « Liberté Egalité Fraternité ».
En Angleterre, le souverain, chef de la monarchie constitutionnelle et de l'Etat, est également le chef de l'Eglise anglicane. Il n’y a donc pas de séparation. En revanche, il y a bien séparation entre l’Etat et les Eglises aux Etats Unis. Cependant, on trouve le même respect pour la diversité des cultes, lié à la tradition multiculturelle des deux pays et à la primauté donnée, non pas aux droits de l’homme selon la conception jacobine égalitaire, mais aux droits des communautés. Aux Etats Unis les différentes vagues d’immigration ont amené plusieurs religions que la société américaine a acceptées dans une logique communautariste.
Peut-on, en expliquant que la Corse n’est française que depuis le 30 novembre 1789, s’affranchir de son histoire pour glisser vers « une laïcité tranquille » calquée sur ce modèle anglo-saxon et une « citoyenneté corse » fondée, comme cela est écrit par Corsica Libéra, sur « les racines chrétiennes de la Corse » et le postulat selon lequel « le peuple corse est sur cette terre la seule communauté de droit ». En conséquence, pour « intégrer » cette « communauté de destin », il ne suffit pas nous dit-on « de fouler le sol de l’île pour devenir instantanément corse », il faut un temps de présence de 10 ans et maitriser la langue corse. Les deux conjugués permettraient alors d’accéder à « la propriété immobilière, à l’emploi ainsi que l’inscription sur les listes électorales ».
La Corse que nous voulons n’est pas celle qui nous ramènerait ainsi au sinistre mot d’ordre I Francesi Fora (IFF) et plus ou moins au droit du sang. Le nouvel élan démocratique auquel les communistes veulent contribuer est celui du respect et de l’ouverture aux cultures. Un élan qui puiserait dans ce que notre pays a su construire de meilleur, de la Résistance aux luttes anticoloniales, des luttes sociales et politiques pour l’égalité au refus des dominations et discriminations, des combats pour la survie de la planète à ceux pour le désarmement et la paix.
Il porterait un projet solidaire de développement des capacités humaines associant toutes celles et tous ceux qui l’écriraient. Imprégné d’internationalisme, il définirait les contours d’une République forte de sa diversité et d’une Union européenne favorable aux attentes sociales et populaires. Conçue sur une ambition de fraternité, d’égalité sociale, antiraciste, démocratique et écologique, il s’inspirerait pleinement des Lumières et des valeurs universelles promues dans le projet républicain de Pascal Paoli et de la plupart des révolutionnaires de 1789.
Michel Stefani