La polémique binaire des Présidents sur les Conseils généraux n’est qu’un trompe l’œil
Depuis la dernière session de l’Assemblée de Corse, il est fait grand cas d’une petite phrase du président de l’Assemblée de Corse prononcée dans son discours d’ouverture. Reprise en Une de Corse Matin, elle a soulevé une vague d’indignation au cœur des Conseils départementaux. Leurs présidents puis des élus départementaux eux-mêmes ont riposté.
Leur forte mobilisation était surement attendue après, il est vrai, une provocation verbale mettant en cause ces institutions honnies depuis toujours par les nationalistes. La phrase en question « les Conseils généraux sont des nids du clientélisme » n’a pas plu et les élus départementaux y sont allés de justification en justification pour faire entendre au président de l’Assemblée de Corse qu’ils n’étaient pas « de mauvais élus ».
Ce dernier n’en a eu cure et leur a répondu qu’il maintenait ses propos.
Les uns et les autres destinataires des fameuses ordonnances en vue de créer une Collectivité unique dans laquelle -après fusion des trois institutions qu’ils président- ils devraient se retrouver, se déchirent donc sous le regard médusé ou amusé des Corses qui n’en pensent pas moins.
Quand on prend les indicateurs sociaux, chômage, précarité, pauvreté, inégalité, cherté de la vie… on ne peut que partager la perplexité ambiante s’agissant d’une réforme de plus dont la principale caractéristique n’est pas d’être institutionnelle, voire administrative, mais bien libérale.
Une fois encore l’essentiel passe à la trappe. Le très large vote qui a prévalu -les élus communistes et citoyen du Front de gauche ont été les seuls à voter contre- comme un enterrement du référendum est presque occulté par ces gamineries de cour d’école où le paraître compte plus que le réel.
Le contenu de la réforme embarquée sur le véhicule législatif de la loi NOTRe, respectueuse des injonctions de la non moins libérale Commission européenne, ne peut pas faire l’objet d’une telle consultation nous dit même le Maire de Bastia parce que les Corses pourraient dire NON.
La confusion est totale et ceux la mêmes qui réclamaient ce « moyen de transport » peu conforme au regard du Statut particulier de la Corse mais prétendument plus rapide pour obtenir la prospérité, en sont à revenir à la nécessité d’une loi décriée en raison du temps qu’elle aurait fait perdre sur ce chemin d’un soit disant meilleur avenir pour la Corse.
Tous adeptes de la simplification administrative, peu contestataires de la politique d’austérité gouvernementale et européenne, ils en sont à s’interroger sur un possible statut quo permettant aux uns et aux autres de maintenir leurs positions.
La CTC pour les uns, les Conseils départementaux pour les autres, cela jusqu’à la fin de la mandature qui verra passer une élection présidentielle et bien sur des législatives à l’assaut desquelles ils pourront monter à partir de leurs bases arrières garantissant la crédibilité des promesses électorales.
Ce cheminement n’est après tout que le prolongement de l’accord politique, unique en son genre et scellé au moment du vote du budget de la CTC, chef de file en Corse sur de nombreuses politiques sectorielles. Les paraphes des deux présidents de l’Exécutif et de l’Assemblée de Corse précédaient ceux de tous les présidents de groupes de l’Assemblée de Corse : nationaliste, droite, FN et gauche sociale démocrate. Seul celui du président du groupe communiste et citoyen du Front de gauche n’y figure pas.
La polémique binaire des Présidents sur les Conseils généraux n’est qu’un trompe l’œil.
Michel STEFANI