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Michel Stefani

Droits de succession en Corse : « L’exigence de faire rimer justice sociale et justice fiscale ».

18 Mai 2016

L’assemble de Corse était convoquée hier en séance plénière mais cette fois ci ouverte à la presse afin que nul n’ignore la teneur des débats concernant la « fin de l’arrêté Miot ». Or si plusieurs intervenants ont vu leurs propos répercutés d’une manière ou d’une autre par les médias, il se trouve que le groupe communiste et citoyen du Front de gauche n’a pas bénéficié de la même bienveillance.

Cela est d’autant plus dommageable qu’est véhiculée l’idée que tous les groupes se sont exprimés de la même façon. Or, ce n’est pas le cas et pour cause en l’absence de vote retenir l’unanimité comme élément essentiel des échanges c’est effectivement prendre le raccourci périlleux qui consiste à vouloir engager « un bras de fer avec le gouvernement de la France ». Ce n’est pas notre choix pour plusieurs raisons que nous avons développées avec une argumentation qui, pour trancher avec les discours entendus, portait une réflexion différente au regard de la situation d’urgence sociale mise en exergue d’ailleurs dans le rapport du Bâtonnier De Casalta.

En effet au moment où la précarité, le chômage, la pauvreté et tant d’inégalités sont à la hausse dans notre région, il faut redistribuer la richesse de manière plus juste et cela passe par la fiscalité. Dans cet esprit un bien qui a vu sa valeur augmenter du fait de l’investissement public ne peut échapper au moment de sa transmission à la contribution d’intérêt général nécessaire en un mot à l’impôt. L’exonération de droits de successions sur les gros patrimoines est donc contraire à cette double exigence qui s’affirme dans la conjugaison pour ce qui nous concerne des deux principes : de justice fiscale et de justice sociale.

Il est question de dépossession, nous n’emploierons pas ce terme, car pour être dépossédé il faut posséder ce qui est loin d’être le cas. En Corse 1 ménage sur 2 ne possède rien et 8 sur 10 sont éligibles de part leurs revenus à un logement social. Pour le reste 91% des actifs nets déclarés en Corse sont inférieurs à 500 000€ et parmi ceux-ci 78 % sont inférieurs à 250 000€. 76 % des successions intéressent 3 héritiers avec l’abattement de 100 000€ plus de 80% des successions sont donc exonérées de fait. Par conséquent il faut déterminer ce qu’est un patrimoine « modeste » ou « moyen », selon les termes employés dans le rapport, avant de définir la progressivité de la taxation conforme à la justice fiscale et sociale.

Le rapport met, à juste titre, l’accent sur la pression spéculative les prix du foncier ou du mètre carré construit en Corse sont à un niveau très élevé ce qui sur ce dernier aspect s’explique d’autant moins que la réfaction de TVA s’applique aussi aux matériaux de construction. C’est à travers ce constat que nous avions amendé la délibération de l’Assemblée de Corse avant de la voter. Il s’agissait d’intégrer la taxation des gros patrimoines et d’obtenir un transfert du produit de cette fiscalité afin que l’Etablissement public foncier, dont nous demandions la création, dispose des moyens financiers supplémentaires permettant une politique d’achat du foncier et de construction de logement sociaux en priorité.

La pertinence de ce choix est renforcée par le paradoxe montrant que le stock de logements disponibles en fin d'année 2012 a atteint les 1 640 logements, soit 16,9 % de plus que fin 2011 ou cette progression fut de 45 %. On voit bien l’absurdité des mécanismes spéculatifs, sans parler des dérives affairistes ou mafieuses, de l’optimisation fiscale, comme le dispositif Cellier, alors que le parc de résidences secondaires est de 34 % et que 7000 demandes de logements sociaux sont en attentes.

C’est pourquoi nous ne mélangeons pas tout entre ceux qui n’ont rien, ceux qui sont propriétaires uniquement de leur résidence et ceux qui peuvent avoir la capacité de faire des placements et disposer de patrimoines immobiliers considérables. De même il faut veiller à ce que le législateur puisse prendre en compte les problématiques du désordre foncier et juridique, celles des biens non délimités, des biens appartenant à des propriétaires décédés, de l’indivision et des successions collatérales proportionnellement plus importantes que partout ailleurs.

La référence au GIRTEC est dans ce cadre indispensable, parce qu’il est un « instrument efficace » avec un volume annuel de 500 dossiers traités et une base de données qui peut s’avérer particulièrement utile dans cette démarche pour laquelle l’exagération n’est pas la bonne méthode sachant que le principe d’égalité devant la charge publique est intangible et que de surcroit les biens acquis au 1er janvier 2003 entrent dans l’application du droit commun pour les successions.

Tout cela ayant été formulé j’ai évoqué la nécessité d’un 5ème scénarii en insistant sur l’aspect fondamental pour notre groupe, compte tenu de la situation sociale et des attentes qu’elle génère, qu’est l’exigence de faire véritablement rimer justice sociale et justice fiscale.

Michel Stefani

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