Valls : Un langage de menteur et de liquidateur ultralibéral de la SNCM
Comme on pouvait s’y attendre la hargne, déployée contre la SNCM et la CGT depuis l’attaque du Jean Nicoli à Porto Vecchio, a eu des prolongements aujourd’hui à Bastia où le siège de la compagnie a été dévasté aux cris de « SNCM Fora » de « CGT Fora ». C’est à la fois le double symbole d’une desserte de service public régulée et d’un syndicalisme antilibéral qui est visé.
Au-delà, c’est l’affirmation d’un modèle de société ou la contestation du low cost n’a plus sa place. L’enjeu consiste donc à présent pour les tenants de cette économie de la concurrence déloyale du dumping social et fiscal, d’obtenir ce pourquoi ils se mobilisent depuis longtemps pour faire sauter ce dernier verrou.
Qualifiée de « dispositif colonial » par ses détracteurs, pour masquer la solidarité nationale exprimée à l’égard de la Corse dans l’intérêt général, la continuité territoriale était la réponse adaptée à une exigence populaire légitime bafouée par les opérateurs privés avant 1976.
De quoi était-il question ?
Premièrement de pouvoir se déplacer de la Corse vers le continent et vice versa dans des conditions équivalentes à celles offertes sur le continent avec le train. Deuxièmement avec le franco de port de neutraliser les coûts de transport des marchandises car déjà la cherté de la vie et les bas salaires étaient au cœur du mouvement social.
Le Conseiller général Ange Pierre Vivoni a expliqué aujourd’hui au micro de RTL : « ce qui se passe à la SNCM ne nous regarde pas » ! L’élu du Cap Corse, où de nombreux marins de la SNCM vivent, poursuit : « Ce que nous voulons c’est une véritable continuité territoriale ».
Sans la SNCM qu’en sera-t-il vraiment ?
« SNCM Fora » et la seule compagnie maritime qui verse sa taxe d’apprentissage à l’école de marine ne le fera plus. « SNCM Fora » et la SITEC perdra la gestion informatique de la billetterie. « SNCM Fora » et 600 familles, de nombreuses entreprises locales prestataires perdraient soit un salaire indispensable soit une part de leur activité sinon la totalité. « SNCM Fora » et les 25 M€ de retombées économiques s’envoleront.
Bien sur il y aura toujours des opérateurs, toujours moins disant, pour transporter 2,5 millions de passagers un mois par an mais cette suractivité estivale non négligeable compte tenu de la caractéristique de l’économie Corse n’aura pas les mêmes effets économiques et sociaux sur un territoire où plus de 20 000 personnes sont au chômage et où prés de 25 000 foyers déclarent des revenus inférieurs au seuil de pauvreté.
La logique low cost c’est ainsi le « business » construit sur la concurrence déloyale. Et ceux qui pensent ainsi pouvoir récupérer une partie des 190 M€ en déspécialisant l'enveloppe de continuité territoriale se trompent lourdement. La réduction des dotations aux collectivités locales le démontrent déjà amplement.
Cependant, le premier ministre appelle ce jour devant les députés à « l’esprit de responsabilité de chacun », dit sur un ton péremptoire que la SNCM a été déficitaire sur les 10 exercices précédents et ignore volontairement les conclusions du rapport de la mission sénatoriale Revet.
Cet acharnement contre la SNCM est suspect car il se préoccupe ni des 180 M€ versé à la CFF pour écrémer la desserte publique et plomber les recettes de la SNCM et de la CMN, ni du vol dont est victime la CTC avec le détournement, évalué à plusieurs millions d’euros, de la Taxe de transport et encore moins des quelques 60 M€ tombés dans la poche du financier Buttler après la privatisation scandaleuse conduite par le gouvernement Villepin Sarkozy.
Le premier ministre se moque du monde en soutenant qu’il tient « le langage de la vérité ». Son langage est celui d’un menteur et d’un liquidateur ultralibéral qui agit pour le compte de Messieurs Frérot et Jaillanac. Ce faisant il révèle un peu plus le cynisme du gouvernement et la responsabilité totale qui est la sienne dans l’extrême tension et les événements qui ont eu lieu à Porto Vecchio et à Bastia. Pour en sortir il lui appartient de changer d’attitude sur ce dossier d’intérêt général et national.
Michel STEFANI